Pour la Pentecôte, commentaire de la Genèse 11, La tour de Babel, 19 mai 2024, année B — Diocèse de Bourges

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Pour la Pentecôte, commentaire de la Genèse 11, La tour de Babel, 19 mai 2024, année B

Commentaire de la Genèse 11, La tour de Babel

Pour la Pentecôte, commentaire de la Genèse 11, La tour de Babel, 19 mai 2024

 

Au terme du temps pascal, la fête de Pentecôte est une fête baptismale, tout comme la Vigile pascale. En effet en ce jour Pierre baptisa 3000 personnes. C'est pourquoi la liturgie comporte pour la vigile un choix de lectures adaptées à la circonstance. Parmi elles le récit de la tour de Babel vient en tête parce que, à la confusion des langues, s'oppose l'harmonie opérée par l'Esprit Saint.

 

Lecture du texte

Quel est l'arrière-plan historique ?

Alors que les Egyptiens élevaient des pyramides en pierre, les Mésopotamiens utilisaient l'argile cuite avec du bitume comme ciment pour leurs constructions, temples et palais. A Babylone, une tour à étages gigantesque (ziggurat) comportait 7 étages, dédiés chacun à un dieu inférieur, le sommet étant réservé à Marduk, le dieu suprême, protecteur de la ville. Il était invité à s'y reposer lors de la fête du début de l'année, où l'on récitait le poème de la création, Enumah Elisch, célébrant la victoire du dieu contre Tiamat, le monstre marin.

 

Combien d'hommes moururent à la tâche ?

L'histoire n'en dit rien. Par contre se déchainent contre la ville trop sûre d'elle-même de nombreux oracles prophétiques, à savoir deux longs chapitres insérés plus tard dans le rouleau d'Isaïe (Is 13 et 14), deux autres aussi longs dans celui de Jérémie (50 et 51, chapitres qui datent d'après l'exil). Relevons la condamnation de la ville arrogante qui prétendait bâtir son trône au-dessus des étoiles de Dieu (Is 14,13). Babylone devient ainsi la figure des empires de proie contre lesquels sévira la justice divine. On lit sa condamnation dans l'Apocalypse : « Elle est tombée, elle est tombée, Babylone, la grande, elle est devenue demeure de démons. » (Ap 18,1-3).

 

Quelle place le récit tient-il dans l'histoire des origines ?

Les 11 premiers chapitres de la Genèse ne relèvent pas du genre historique, mais juxtaposent des traditions relatives au développement de l'humanité. Dans cet ensemble, le cycle du Déluge tient une grande place en présentant le juste Noé comme l'ancêtre d'une humanité qui se diversifie en de multiples cultures. La table des peuples en Genèse 10 est très significative. Or, selon Gn 11,1 la terre entière n'avait qu'une seule langue. Le récit relatif à la tour de Babel est donc spécifique et l'on peut parler à son sujet d'un récit étiologique, c'est-à dire destiné à expliquer le sens d'un mot ou d'un fait. Ici, c'est le nom de Babel (en accadien bab-ilu, porte du dieu) qui est expliqué par le mot balal dispersion, confusion (v. 9).

 

Quel est le péché des hommes ?

Bâtir une tour dont le sommet touche le ciel : n'est-ce pas l'expression d'un orgueil démoniaque ? On le comparera au désir de manger du fruit pour obtenir la connaissance de ce qui est bien et de ce qui est mal (Gn 3,5). Adam et Eve espéraient devenir comme des dieux. Ici ce sont les Babyloniens qui se glorifient de leurs forces et veulent s'assurer un nom en soumettant tous les peuples.

Dieu prend ombrage de cette volonté de toute puissance, comme lors de l'expulsion du paradis : « Voici que l'homme est devenu comme l'un d'entre nous. » (Gn 3,22) Dieu serait-il jaloux de sa propre gloire ? Il faut bien sûr décrypter ce langage anthropomorphique à la lumière de la prédication de Jésus sur le Dieu qui fait pleuvoir sur les justes comme sur les méchants. Il n'en reste pas moins que l'orgueil prométhéen entraîne trop souvent la mort de l'homme.

 

De Babel à la Pentecôte

A la liste des 70 peuples de la Genèse correspond selon Luc l'envoi de 70 disciples par le Seigneur (Lc 10). Manifestement il s'agit pour Luc d'une anticipation de ce qui commencera à se réaliser au jour de Pentecôte. Impressionnante en effet la liste des peuples réunis pour la fête des Semaines (Pentecôte). Tous entendent dans leur propre langue les merveilles de Dieu.

Miracle unique en son genre qui a été mis en valeur par la tradition patristique. Citons S. Cyrile d'Alexandrie : « La variété des langues qui était, à la tour de Babel, signe de dispersion et d'éparpillement vers toutes les nations, est devenue, dans le Christ, signe du rassemblement dans l'unité, par l'Esprit, et gage de l'accès aux réalités d'en haut. »

Lors du concile Vatican II, la possibilité d'utiliser les langues maternelles pour la liturgie suscita de vives discussions. C'est alors que Maximos IV, patriarche d'Antioche, déclara que depuis la Pentecôte il n'y a plus de langue sacrée et que toutes les langues sont appelées à communiquer la Parole de Dieu.

Une application pour aujourd'hui

Le 20e siècle a connu une série de dictatures, toutes plus impitoyables les unes que les autres. Ce fut l'honneur de chrétiens convaincus d'obtenir la réconciliation de la France et de l'Allemagne et de travailler en vue d''une Europe solidaire. A la veille des élections européennes, comme il est urgent de travailler, avec l'aide de l'Esprit Saint, à bâtir une tour, signe de réconciliation et de paix !

 

P. Edouard Cothenet